Frank Zappa "Studio Tan"
By Francis Vincent
FRANK ZAPPA
STUDIO TAN
Discreet DKS 2291 (dist. WEA)
Voilà un album qui réjouira les vieux fans, ceux qui se passionnèrent pour « Uncle Meat » et qui restaient sur leur faim depuis quelque temps, il faut bien le dire. Un album qui surprendra ceux qui ont découvert F.Z. avec « Apostrophe ». Voilà qui marque le retour (perçu dans « Black Page », ainsi qu'aux concerts pari siens de février dernier) des compositions de facture classicocontemporaine à base de percus sions qu'a toujours affectionnées Zappa.
Le disque débute avec les aventures, multiples (dont un savou reux moment parmi les dactylos de « Big Swifty and Associates »), de Greggery Peccary, petit animal d'une Amérique moyenne à « col blanc », et à qui il en arrivera de toutes les couleurs. Très proche dans son développement d'une pièce comme « Billy The Mountain », « Greggery Peccary », outre son matériau propre, utilise divers ingrédients, éléments épars rassemblés ici en collage, selon la technique du « clin d'eil » chère à Zappa. Après une courte intro aux sonorités de « Lumpy Gravy », Zappa bat le rappel des vieilles compositions.
Cela va de références à « I'm Stealing The Towels », « Dental Hygiene Dilemma » (« 200 Motels »), au final très « Grand Wazoo » (for Calvin?), en passant par le récitatif bien proche de « Billy The Mountain », ainsi que le background à la basse (durant l'épisode du « Steno Pool») directement issu de « Carolina Hardcore Ecstasy » (« Bongo Fury »). Pour les apports extérieurs, on peut citer Messiaen et le « Marteau Sans Maitre » de Boulez.
La face 2 s'ouvre sur une amusante parodie de rengaines commerciales, « Let Me Take You To The Beach » (Are you kidding? You probably streak out, you probably freak out 1). Le morceau suivant, « Revised Music For Guitar And Low Budget Orchestra », est le remake d'une composition destinée à l'origine au violon. Les bavardages de la première version ont été supprimés, et le violon un peu guindé de Ponty est ici avantageusement remplacé par la guitare de Zappa. Dans sa conception, cette nouvelle mouture se présente comme la synthèse de la musique zap paienne depuis huit ans, puisqu'aussi bien l'introduction trouve son thème dans « Twenty Small Cigars» (« Chunga's Revenge ») aussi suivi d'un duo guitare/piano reprenant « Little Umbrellas » (« Hot Rats ») avec la sonorité de « It Must Be A Camel ». La partie centrale de la pièce est un nouvel arrangement de « Music For Violin And Low Budget Orchestra », agrémenté de quelques chorus de «Waka/Jawaka » (« Hot Rats n° 2 »).
Le disque se termine sur « Redunzl », prétexte à un long solo de guitare de Zappa, solo très enlevé, plein de trouvailles, toujours très inventif, après que le thème, une nouvelle fois extrait de « Lumpy Gravy », ait été suivi d'un solo de piano remettant en mémoire le « Ponty Plays The Music Of F. Zappa ».
Au total, ce disque est certainement le meilleur depuis « One Size Fits All », loin de l'anecdotique retrouvaille Zappa/Beefheart (« Bongo Fury »), des fadaises disco-pop de « Zoot Allures », ou encore du « Live At New York », bric-à-brac de merveilleuses choses ( « Black Page » et « Titties And Beer ») et de très banales reprises, comme « Big Leg Emma » et « Sofa ».
FRANCIS VINCENT.