Comment Zappa?
By Serge Loupien
Un concert exceptionnel en Tchécoslovaquie, la réédition compacte de ses œuvres complètes incluant huit disques pirates réintégrés, un nouveau double album live, à l'heure où la rumeur se veut alarmante quant à l’état de santé de Francis Vincent Zappa, son actualité musicale n’a jamais été aussi fournie. Entretien exclusif.
Londres, envoyé spécial
L’hôtel Dorchester, au 53 Parklane (vue imprenable sur Hyde Park), compte parmi sa clientèle prestigieuse les noms d’Elizabeth Taylor, de Maria Callas, de Louis Armstrong et d’Humphrey Lyttleton. Le 19 mars 1964, c’est dans ses salons mœlleux que les Beatles ont donné l’une de leurs plus mémorables conférences de presse. C’est aussi là, dans une chambre dont on a oublié pudiquement le numéro, que Peter Sellers, l’inoubliable interprète de la Party de Blake Edwards s’est éteint, le 24 juillet 1980.
Le Dorchester se veut donc un établissement de classe. Le genre à interdire l’accès de son bar à tout chevelu porteur de jeans. Comme Frank Zappa, justement, qui occupe, avec son épouse Gail, une suite au deuxième étage.
En transit vers les Etats-Unis, Zappa est de retour de Tchécoslovaquie où, répondant à une invitation de Vaclav Havel (un fan de la première heure), il a interprété quelques titres en compagnie de musiciens locaux afin de célébrer dignement le départ des troupes soviétiques. Son dernier concert probablement. Car il annonce d’entrée qu’il ne touchera désormais plus à sa guitare, scellée dans sa housse rigide, et abandonnée dans un coin de la pièce.
Sweat-shirt gris et pantalon de toile, visage tiré, cheveux (longs) grisonnants, le créateur des Mothers of Invention paraît anormalement fatigué. Répondant mécaniquement aux questions posées, d’une voix monocorde, reprenant son souffle entre chaque phrase, le regard absent. Jusqu’à ce que subitement, son œil s'allume brièvement, à l’évocation d’un nom ou d’un souvenir précis, incitant à un développement anecdotique passager. Avant de retomber aussitôt dans cette espèce d’indifférence polie servant manifestement de façade à un homme que l’on devine physiquement au bout du rouleau.
LIBERATION. Quand vous étiez adolescent, qu’est-ce qui vous a tellement séduit chez Edgar Varèse?
FRANK ZAPPA. J’ai commencé à jouer des percussions quand j’avais douze ans. Dans l’orchestre de l’école. Et dans ce genre de formation, la musique que l’on vous donne à jouer est généralement ennuyeuse à mourir : une note de tom basse, un ding de triangle... Et puis un jour, j’ai découvert Ionisation et, pour la première fois, je me suis rendu compte de ce que l’on pouvait réellement faire avec des percussions. Ca m’a vraiment excité.
LIBERATION. Vous avez tout fait pour le rencontrer à une époque. Si vous y étiez parvenu, que lui auriez-vous dit ?
F.Z. Merci, d’abord. Et puis j’aurais essayé de savoir pourquoi il écrivait de cette façon pour ces instruments. Parce que de tous les compositeurs contemporains que je connais, il est le seul à utiliser de manière extensive toutes les sortes de percussions. Les autres s’en servent principalement pour renforcer le reste de l’orchestre.
LIBERATION. Saviez-vous que Charlie Parker a essayé de prendre des leçons avec lui?
F.Z. Non, je l’ignorais. C’est drôle, la rencontre aurait pu être intéressante. Ca aurait donné matière à un bon enregistrement pirate.
LIBERATION. Comment était Los Angeles à l’époque de vos débuts?
F.Z. En 65, 66, c’était vraiment bien, mais la police s’en est vite mêlée. Les endroits où traînaient les freaks, les cafés, les restaurants, les clubs où les groupes pouvaient jouer, tout a été fermé. Fin 66 début 67, il n’y avait plus un seul endroit où travailler à Hollywood si vous portiez les cheveux longs. C’est pour ça que je me suis décidé à partir pour New York. Mais quand nous sommes arrivés là-bas, il n’y avait pratiquement personne avec les cheveux longs. C’était en plein hiver, et nous travaillions dans un lieu appelé le Balloon Farm, sur St Mark’s Place, dans l’East Village. Je vivais dans un hôtel de la Onzième Rue, ce qui représentait une bonne trotte sous la neige. Tous les soirs, c’était la galère pour prendre un taxi parce qu’aucun chauffeur ne voulait s’arrêter à cause de nos cheveux. Donc, il nous fallait nous emmitoufler de façon â les dissimuler.
LIBERATION. Vous étiez alors plus proche de la musique d’Eric Dolphy que de celle des Doors. Comment parveniez-vous à faire partager vos vues à vos musiciens?
F.Z. Certains membres du groupe venaient du jazz. Ils connaissaient parfaitement le travail d’Eric Dolphy et savaient l’apprécier. Ils comprenaient ma démarche, je n’avais pas besoin de les forcer.
LIBERATION. Qu’est devenue Suzy Creamcheese?
F.Z. Laquelle? Celle de l’album ? Je ne sais pas. Je ne l’ai plus revue depuis l’enregistrement. Son vrai nom était Suzy Basser [Jeannie Vassoir]. J’ignore ce qu’elle est devenue. Par contre, sa copine, l’une des voix de l’album, je l’ai rencontrée à Séville en 1988.
LIBERATION. Est-il exact que McCartney a empêché la sortie de We’re Only In It For The Money?
F.Z. Tout à fait exact.
LIBERATION. Pour quelle raison?
F. Z. Avant que nous fassions cette pochette à la Sgt Pepper’s, je crois qu’il y avait déjà eu deux autres parodies mais qui, à mon avis, n’allaient pas aussi loin. D’ailleurs, ce n’est pas seulement une parodie de Sgt Pepper’s, ça inclut aussi les Rolling Stones, avec un Stone en travesti, un l autre dans un fauteuil roulant, etc. Lors de mon premier voyage en Europe, quand nous sommes passés par l’Angleterre, j’ai téléphoné à McCartney. Je lui ai expliqué que nous nous apprêtions à sortir cette parodie de la pochette de l’album des Beatles, en lui demandant s’il y voyait une quel-conque objection. Nous étions chez MGM à l’époque, et les responsables de la compagnie étaient terrorisés à l’idée que les Beatles puissent les attaquer. Ils voulaient avoir un accord préalable. Au téléphone, la réponse de McCartney a été du style: « C’est votre problème, débrouillez-vous avec mon avocat. » Le temps que celui-ci intervienne enfin, il s’était passé treize mois pendant lesquels le disque n’était toujours pas sorti.
LIBERATION. A l’image d’un Miles ou d’un James Brown, vous avez toujours eu la réputation d’être un leader quasi dictatorial...
F.Z. Je ne sais pas comment Miles et James Brown dirigent leurs forma- tions, mais la manière dont moi je dirige la mienne ressemble fort à celle d’un chef d’orchestre à la tête d’un orchestre symphonique. C’est-à-dire qu’à la base, les musiciens sont de simples exécutants. Ils sont là avant tout pour respecter la partition. Si c’est ça la dictature, alors d’accord, je suis un dictateur.
LIBERATION. Mais vous leur laissez quand même une certaine liberté à l’intérieur de cette structure...
F.Z. Si la structure elle-même prévoit un solo, alors oui. Mais il ne peut pas y avoir de composition sans instructions préalables. Si la composition comporte une ligne de basse mélodique, vous exigez que le bassiste la joue en la respectant. Et si vous voulez que la batterie soit autre chose qu’un solo non-stop, vous dites au batteur de jouer d’une certaine manière, en l’obligeant à s’arrêter quand il le faut. Même chose avec les autres instruments. L’ensemble crée une forme. Sinon, c’est de la musique dixieland.
LIBERATION. Le concert de 1970 avec le Philharmonic Orchestra de Los Angeles a été quelque chose d’important pour la suite de votre carrière ?
F.Z. Oui, dans le sens où il m’a montré à quel point ce monde musical était stupide. C’était la première fois qu’un orchestre symphonique jouait ma musique, et on m’a refusé le droit d’en faire une cassette. Ils m’ont dit que si je voulais enregistrer, il fallait payer. Donc je ne pouvais entendre ce que j’avais composé que de l’endroit où je me trouvais sur scène. C’est-à-dire que si j’étais derrière les percussions, il m’était pratiquement impossible d’entendre les cordes. Le plus absurde, c’est qu’au cours du concert, quelqu’un a piraté avec un petit appareil, et personne ne lui a rien dit. Si j’avais voulu faire une bande pour moi, le syndicat m’aurait attaqué. Dix mois après ce concert qui a eu beaucoup de succès, les gens du Philharmonic sont venus me relancer afin que je leur écrive un Concerto pour deux pianos et orchestre en vue d’une création mondiale. « C ’est très gentil de votre part » leur ai-je dit. « II y ajuste un problème, m’ont-ils expliqué, nous souhaiterions que vous achetiez deux Bosendorfers tout neufs pour pouvoir le jouer. » C’est la dernière fois que j’ai parlé à quelqu’un du Philharmonic de L.A.
LIBERATION. Pourquoi avoir choisi Ringo Starr afin d’interpréter votre rôle dans 200 Motels?
F.Z. Il me semblait que le film avait besoin d’avoir un Beatle et Ringo me paraissait être celui des quatre qui avait le plus d’humour.
LIBERATION. C'aurait été amusant d’engager Paul, vu vos mésaventures passées...
F.Z. Il se prend un peu trop au sérieux.
LIBERATION. On vous tient pour responsable du mouvement qu’on appelle Fusion. Vous êtes d’accord?
F.Z. Je ne sais pas si c’est tout à fait justifié. Il y a eu pas mal d’autres choses auparavant dans la culture musicale américaine, genre le Third Stream, par exemple. Des compositeurs chevronnés, comme Gunther Schuller, qui expérimentaient un mélange de jazz et de classique. Je crois que ce sont plutôt ces gens-là qui sont les pionniers de la Fusion.
LIBERATION. Sauf que leur musique n’a jamais fait appel à l’électricité...
F.Z. C’est vrai, elle était entièrement acoustique. Pourquoi, pour obtenir la fusion il faut se brancher sur l’électricité?
LIBERATION. Aujourd’hui, ça parait vital...
F.Z. D’accord. Dans ce cas là, j’ai remporté le premier prix.
LIBERATION. Vous souvenez-vous de votre concert avec Roland Kirk?
F.Z. Deux, il y en a eu deux. Un à Boston, l’autre à Miami. Celui de Boston a eu plus de succès, mais celui de Miami était plus compliqué. Il n’y avait pas seulement Kirk et mon orchestre. Il y avait ce vibraphoniste, Gary, euh...
LIBERATION. ...Burton?
F.Z. ...Burton. Et il n’existait pas une très bonne coordination entre ce que faisait Roland Kirk et ce que faisait Gary Burton. Celui-ci a joué de manière trop encombrante. Mais le concert de Boston était intéressant. A l’époque, on utilisait une sorte de chorégraphie. Au signal, le premier rang s’allongeait et jouait par terre. Et au signal, Roland Kirk s’est allongé en même temps que les autres. Je me demande encore comment il s’est dé- brouillé parce que je ne lui en avait pas parlé auparavant. Mais il était là par terre, avec les autres.
LIBERATION. Vous citez régulièrement Johnny « Guitar » Watson comme votre première influence de guitariste...
FZ. Oui, Johnny « Guitar » Watson, Clarence Brown et Guitar Slim.
LIBERATION. Tous guitaristes de blues...
F.Z. Avant l’arrivée de Wes Montgomery, je ne me suis jamais vraiment passionné pour la guitare jazz. C’est le premier que j’ai trouvé intéressant, harmoniquement parlant.
LIBERATION. Depuis le début, de par la complexité de certaines de vos compositions, vous avez toujours un peu servi de caution respectable à la musique rock. Ca ne vous ennuie pas?
F.Z. C’est quelque chose que je n’ai jamais compris. Ca ne m’ennuie pas, mais je suis capable d’écrire aussi de la musique simpliste. Il n’y a d’ailleurs rien à reprocher à ce genre de musique. Les gens qui ont un problème sont ceux qui pensent que la musique simpliste ne vaut rien. Je crois que la musique n’a pas besoin d’être tout le temps compliquée pour avoir droit de cité. Il faut juste qu’elle soit la bonne musique à écouter au bon moment.
LIBERATION. On vous a souvent reproché d’être un soliste trop bavard...
F.Z. Je sais. J’ai entendu ce genre de critique pendant des années. Ceux qui aiment disent que c’est trop bref, ceux qui n’aiment pas que c’est trop long. Maintenant c’est réglé, je n’ai plus à m’en faire, je ne joue plus de guitare.
LIBERATION. Vous avez également la réputation, via vos lyrics, d’être un obsédé sexuel de première...
F.Z. Hé oui. Que voulez-vous que je vous dise? La sexualité, c’est important. C’est une chose naturelle dans l’existence, et les gens qui s’en détournent devraient inspirer de la pitié. Parce qu’autrement, que reste-t-il? Le football? Le chômage?
LIBERATION. Votre carrière n’a été qu’une longue suite de conflits avec les compagnies phonographiques...
F.Z. Mes conflits avec les maisons de disques ont cessé depuis que je les ai toutes attaquées en justice au moins une fois. Maintenant, je suis à la tête de ma propre compagnie et, à moins de me poursuivre moi-même, je ne devrais donc pas avoir trop de problèmes à l’avenir.
LIBERATION. Il vous a été facile de récupérer tous vos droits?
F.Z. Non. Très dur, très long et très cher. Ca m’a pris beaucoup d’années, mais je ne regrette pas de l’avoir fait.
LIBERATION. Vous venez de lancer une opération anti-pirates assez spectaculaire...
F.Z. L’objectif était de récupérer ce que des gens avaient volé, de le remettre en forme et de le vendre moins cher qu’ils ne le vendaient. Le coffret vient de sortir, on va voir si ça marche.
LIBERATION. Vous avez tout remixé?
F.Z. Rien du tout. Je me suis contenté de voler les voleurs, ah-ah! Même mauvais enregistrement, même vi- laine pochette, ah-ah! C’est juste beaucoup moins cher.
LIBERATION. Votre relation avec Pierre Boulez a toujours ressemble à un mariage contre nature...
F.Z. Qu’est-ce qui vous fait dire ça?
LIBERATION. En France, il n’est guère réputé pour son sens de l’humour...
F.Z. C’est une erreur. Je le trouve très amusant, moi. Je l’aime bien. Peut-être que quand il parle à quelqu’un en français, il n’est pas drôle, mais le dialogue que nous avons eu en anglais aux Etats-Unis a fait se plier de rire tous les auditeurs.
LIBERATION. Musicalement, ce n’est tout de même pas un modèle d’ouverture...
F.Z. Je ne peux pas vraiment commenter sa réputation en France en ce qui concerne ses compositions ou ses déclarations sur la musique. Mais j’écoute ses disques depuis 56 ou 57 – le premier album que j’ai trouvé aux Etats-Unis était le Marteau sans maître – toujours avec grand plaisir.
LIBERATION. Vous faites aujourd’hui l’objet d’un véritable culte. Ca vous flatte ou ça vous navre?
F.Z. Ni l’un ni l’autre. Ca ne me perturbe pas vraiment vu le champ, dans lequel j’opère: celui du divertissement. Si j’arrive à divertir, alors tant mieux. Et je n’ai pas à être plus ou moins flatté que n’importe quel autre entertainer.
LIBERATION. Si l’on devait vous dresser une statue, vous la préféreriez à titre de rocker ou à titre de chef d’orchestre-compositeur?
F.Z. Je pense que les seules personnes qui se préoccupent de statues sont les généraux.
LIBERATION. Vous gardez un bon souvenir de votre participation à Miami Vice?
F.Z. Je n’ai même pas visionné l’épisode dans lequel j’ai tourné. Je n’ai pas la moindre idée de ce que ça donnait. Vous savez ce que je faisais le soir où il a été diffusé à la télévision américaine? Je regardais Pierre Boulez diriger au Lincoln Center de New York.
LIBERATION. Vous revenez d’un concert spécial en Tchécoslovaquie. Est-il vrai que Vaclav Havel vous a demandé de faire partie de son gouvernement?
F.Z. C’est une affirmation totalement fantaisiste. D’abord, je ne parle pas tchèque et ensuite, le gouvernement des Etats-Unis n’apprécierait que très modérément.
LIBERATION. Et votre pseudo-candidature à la présidence américaine, c’est aussi une pure fantaisie ?
F.Z. Je suis en train de faire une étude pour voir si c’est possible. Si les résultats sont positifs, alors oui je me présenterai.
LIBERATION. Comme Dizzy Gillespie avant vous?
F.Z. J ’imagine que mon programme sera légèrement différent de celui de Dizzy. J ’aimerais me débarrasser des impôts sur le revenu et corriger la politique intérieure sur l’emploi, car c’est un vrai foutoir pour l’instant.
LIBERATION. Vous êtes à la tête d’une impressionnante discographie: ça signifie que vous avez une facilité de création peu commune ou que vous êtes un bourreau de travail?
F.Z. Suivant qu’on apprécie ou non ce que je fais, c’est selon.
LIBERATION. De nombreux nouveaux groupes californiens se réclament aujourd’hui de votre influence...
F.Z. Je n’ai jamais entendu parler de ces groupes. Je crois que n’importe quel groupe se réclamant de moi aux Etats-Unis est voué à l’obscurité. Tout groupe voulant copier ce que je fais ne passera jamais à la radio.
LIBERATION. Ils déclarent surtout avoir découvert leur vocation grâce à votre exemple...
F.Z. Ça j’aime bien. Je suis content que des gens aient cette conception de l’influence.
LIBERATION. Vous êtes à l’écoute des nouveaux courants: rap, house?
F.Z. Ca ne m’intéresse pas tellement. Je peux regarder les nouveaux tubes sur MTV, mais je préfère zapper (ah- ah!) sur les informations.
LIBERATION. Ces musiques ne vous paraissent-elles pas déjà démodées?
F.Z. Si l’on considère Return Of The Son Of Monster Magnet,, il y a vingt-cinq ans, sur notre premier album, c’était déjà une sorte de rap. L’émergence du rap ne m’impressionne pas tellement et la house consiste à prendre des bouts de musiques d’autrui et à les coller ensemble. Je ne trouve pas ça intéressant à écouter. Mais certains aiment danser là-dessus, alors ça va.
LIBERATION. Vous êtes fier de votre fils Dweezil?
F.Z. Oui. C’est un magicien.
LIBERATION. Pourquoi avoir adapté récemment le Boléro de Ravel?
F.Z. Parce que c’est tout simplement un beau morceau de musique et que je pensais que ça sonnerait bien en reggae. Ce n’est pas tous les jours qu’on peut entendre un boléro-valse-reggae.
LIBERATION. Les puristes n’ont pas piqué une crise?
F.Z. En fait, il y a eu scandale. L’éditeur du Boléro s’est plaint et, sauf en Angleterre où c’est dans le domaine public, on doit retirer tous les albums du marché. Donc, il va falloir ressortir cet album sans le Boléro. C’est une situation très étrange: Ravel n’a pas laissé d’héritiers. Il a légué son héritage musical à sa lingère, à son chauffeur et à son jardinier. Leurs héritiers sont maintenant les gérants de cette propriété musicale et apparemment, ce sont eux qui ont porté plainte.
LIBERATION. Maintenant que vous ne jouez plus de guitare, vous vous consacrez à la composition?
F.Z. Oui.
LIBERATION. Quel genre?
F.Z. Mon prochain album sera probablement un enregistrement de synclavier. Et le suivant, un disque avec l’Ensemble Moderne, un orchestre contemporain de vingt-cinq instruments. Une formation assez proche de celle avec laquelle travaille Boulez. Je vais composer une nouvelle pièce qui sera jouée en première mondiale en ouverture du Festival de Francfort, la semaine du 14 septembre 1992.
LIBERATION. Les rumeurs vont bon train quant à votre maladie (cancer de l’estomac, Ndlr)...
F.Z. Je refuse de parler de ma santé...
Serge LOUPIEN
Dernier album: Make A Jazz Noise Here (dist. Vogue).
« Beat The Boots » Box Set, coffret de huit albums pirates, 1967â 1981 (dist. Vogue).
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